Ce lundi 29 avril, les Togolais ont commencé à voter aux élections législatives après une réforme constitutionnelle controversée qui, selon les opposants, permet au président Faure Gnassingbé de prolonger l’emprise de sa famille sur le pouvoir depuis des décennies.
Le scrutin intervient après que les législateurs ont approuvé ce mois-ci la réforme créant un nouveau poste de type Premier ministre, selon les opposants, adapté à Gnassingbé pour éviter les limites de mandat présidentiel et rester au pouvoir.
Au pouvoir pendant près de 20 ans, Gnassingbé a succédé à son père Gnassingbé Eyadema, qui a lui-même dirigé pendant près de quatre décennies à la suite d’un coup d’État dans ce petit État côtier d’Afrique de l’Ouest coincé entre le Bénin et le Ghana.
« C’est la première fois que je vote, car j’habitais auparavant dans un pays voisin. Je suis sorti tôt pour éviter les foules », a déclaré Koffi Ohini, un technicien agricole de 24 ans, qui a voté à Lomé, la capitale. « Je veux voter parce que ces élections sont importantes ».
La participation anticipée aux bureaux de vote de la capitale a été dispersée mais les rues étaient calmes. Le vote de lundi élira 113 législateurs ainsi que, pour la première fois, 179 députés régionaux des cinq districts du pays qui, avec les conseillers municipaux, éliront un Sénat nouvellement créé.
Pour le parti UNIR au pouvoir de Gnassingbé, cela rend le Togo plus représentatif, mais les partis d’opposition ont mobilisé leurs partisans pour voter contre ce qu’ils considèrent comme un « coup d’État institutionnel ».
Gnassingbé, 57 ans, a déjà remporté quatre élections, toutes contestées par l’opposition comme étant entachées d’irrégularités. Il n’aurait pu se présenter une nouvelle fois à la présidence qu’en 2025, selon la constitution précédente.
Avec une population de près de neuf millions d’habitants, l’économie du Togo est principalement agraire, même si Lomé possède l’un des ports en eau profonde les plus fréquentés d’Afrique de l’Ouest, aidant le pays à surmonter les retombées de la guerre en Ukraine et de la pandémie.
Le gouvernement s’est concentré sur le développement des infrastructures et l’élargissement de l’accès à l’électricité, mais les niveaux de pauvreté se situent toujours autour de 40 pour cent, selon la Banque mondiale.
Comme ses voisins du golfe de Guinée, le Togo est également confronté à un risque croissant de débordement des conflits djihadistes au nord du Sahel. Les autorités ont fait état de 30 décès dus à des incidents « terroristes » dans le nord du pays l’année dernière.
«Nouveau poste, nouveau pouvoir»
Selon la nouvelle constitution adoptée par les législateurs le 19 avril, le président togolais assumera un rôle essentiellement cérémoniel, élu par le Parlement, et non par le peuple, pour un mandat de quatre ans.
Le passage du système togolais d’un système présidentiel à un système parlementaire signifie que le pouvoir appartient désormais au nouveau président du conseil des ministres, une sorte de super-Premier ministre, qui sera automatiquement le chef du parti majoritaire dans la nouvelle assemblée.
L’Union pour la République de Gnassingbé, ou parti UNIR, domine déjà le Parlement. Si le parti au pouvoir l’emporte lundi, Gnassingbé pourra assumer ce nouveau poste.
Les résultats du scrutin devraient être publiés dans les six jours. L’organisme régional ouest-africain de la CEDEAO a annoncé qu’il enverrait une équipe d’observateurs au Togo pour le vote. La période précédant les élections a été marquée par un renforcement des contrôles. Les tentatives de l’opposition d’organiser des manifestations contre les réformes ont été bloquées par les autorités.
La Commission électorale du Togo a refusé d’autoriser la Conférence épiscopale togolaise à déployer des observateurs électoraux à travers le pays, selon un document consulté par l’AFP.
La Haute Autorité togolaise de l’audiovisuel et de la communication (HAAC) a également suspendu temporairement toute accréditation de la presse étrangère pour couvrir les élections.
AFP/Sahutiafrica