Elu président après le raz-de-marée de son parti aux élections, Duma Boko aura mis trois décennies à déboulonner le parti au pouvoir depuis 1966.
M. Boko, 54 ans, doit succéder à Mokgweetsi Masisi, 63 ans, dans un passage de témoin aussi historique que pacifique, ce dernier ayant « assuré au président élu » qu’il allait se soumettre à une « transition en douceur et transparente » dans cette démocratie stable d’Afrique australe.
Sa troisième candidature à la présidence a été la bonne après ses vaines tentatives de 2014 et 2019. La coalition de gauche Umbrella for Democratic Change (UDC), qu’il a contribué à fonder il y a plus de dix ans, a remporté les élections de ce pays riche en diamants.
Duma Boko, comme la plupart des 2,6 millions de Botswanais, n’avait jamais connu d’autre couleur que le rouge du Parti démocratique du Botswana (BDP) à la tête du pays depuis l’indépendance du Royaume-Uni en 1966.
Porté par une campagne énergique, qui a trouvé un écho auprès d’une jeunesse assoiffée de changement et confrontée à un fort chômage (38% chez les jeunes, 27% pour l’ensemble de la population), il a promis des réformes pour créer des emplois, lutter contre la grande pauvreté et améliorer l’accès aux soins.
« Vous avez vraiment voté dans votre propre intérêt, pour vos droits, pour un système qui soit réactif, agile et qui protège et défende vos droits fondamentaux », a-t-il déclaré vendredi à ses partisans.
Première surprise
En passe de devenir le premier président né après l’indépendance, Duma Boko vient d’un village perdu, niché à 200 kilomètres au nord de Gaborone, capitale de ce pays surtout désertique.
A la différence de son précédent, fils de député et de ministre, frère de parlementaire et de général, Duma Boko n’était pas prédestiné aux plus hautes fonctions.
Cela ne l’a pas empêché, après un diplôme de l’Université du Botswana en 1993, d’obtenir un master à l’école de droit de Harvard en 1995. Décrit comme scrupuleusement honnête, Duma Boko incarne aussi physiquement une forme de renouveau, portée par son charisme d’orateur plaideur et son style soigné, à l’image de sa raie tracée à la tondeuse.
C’est pourtant un vétéran de l’opposition botswanaise : il a rejoint le Front national du Botswana à seulement 21 ans avant d’en prendre les rêves en 2010 et de le placer dans le giron de la coalition UDC.
« Duma Boko ferraille dans l’opposition depuis un certain temps », souligne Washington Katema, directeur de l’ONG Réseau de défense des droits humains en Afrique australe.
Peu aurait parié sur lui après les élections de 2019 quand l’UDC avait reculé en nombre de sièges par rapport à 2014 : deux de perdus, dont le sien. La scission avec le Parti du Congrès du Botswana (BCP) et le Front patriotique du Botswana (BPF), d’anciens alliés ayant quitté l’UDC, n’augurait pas d’une telle vague dans un scrutin uninominal à un tour.
« Ça m’a choqué », a d’ailleurs lâché le mesuré avocat au journal indépendant Mmegi vendredi. « Que ce soit les scores où l’intensité avec laquelle les gens ont participé au vote. C’est avec beaucoup d’humilité que je leur promets de faire de mon mieux ».
AFP/Sahutiafrica