Le Président Félix Tshisekedi s’est adressé à la nation le vendredi 23 octobre, une communication qui alimente encore la chronique. Un discours dans lequel il a promis d’ouvrir les consultations politiques cette semaine. Nous avons posé la question à Patrick Mbeko, auteur, analyste, politologue et spécialiste de la région des Grands Lacs, pour avoir ses impressions sur le discours du président Congolais. Dans un entretien exclusif, Patrick Mbeko estime que le discours du président Félix Tshisekedi n’a pas convaincu.
Sahuti Africa: Qu’avez-vous pensé du discours du président Tshisekedi à la nation le 23 octobre dernier?
Patrick Mbeko: On s’attendait à une déclaration surprenante qui aille dans le sens de mettre fin à la crise que connait le pays. Mais, on a eu droit à des redites. On a eu l’impression d’entendre un Président qui veut s’affirmer et en même temps, il a exposé ses limites dans la gouvernance. Félix Tshisekedi a livré un discours à double facette. D’un côté, l’affirmation de soi et de l’autre une certaine forme d’acceptation du fait que c’est le FCC (Front commun pour le Congo, son allié au pouvoir) qui est le maître du jeu politique.
SA: Est-ce une bonne façon de communiquer en cette période?
Patrick Mbeko: Sur le plan de la communication, cela est une grave erreur. Le discours du Président Tshisekedi est lié à la prestation de serment des trois juges constitutionnels deux jours avant. Une cérémonie organisée au Palais du peuple contre l’avis du FCC. Sur le plan de la symbolique, Félix Tshisekedi avait marqué un point. Maintenant, ceux ont conseillé au président congolais d’aller plus loin avec sa communication du 23 octobre ont commis une erreur grave sur le plan stratégique. Au regard de l’opinion, avec la prestation de serment des juges, Félix Tshisekedi avait réussi à s’imposer face au FCC. Avec sa communication du 23 octobre, il n’a fait que rappeler un état de fait; à savoir: la réalité d’un écosystème de pouvoir qui est le sien. Un écosystème phagocyté par le FCC. C’est en fait un aveux d’impuissance au delà de la posture d’affirmation de son autorité qu’il avait.
SA: Il aurait aussi envoyé des messages au FCC?
Patrick Mbeko: Dans le fond, le discours du président Félix Tshisekedi pouvait avoir plusieurs objectifs. L’objectif d’affirmation de soi. Passer le message au FCC du genre, je ne veux plus me soumettre à vos chantages et caprices. Le fait est que quand on voit la fin du discours, il renvoie aux consultations pour revenir ensuite discuter. On voit bien que c’est un discours purement politique qui n’a pas de substance de fond. Dans la mesure où, on voit que c’est tout de même le FCC qui a la majorité absolue dans les deux chambres. On est beaucoup plus dans une posture.
Et je suis même persuadé que le président Félix Tshisekedi a fait ce discours là avec l’assentiment de Joseph Kabila, président honoraire. Il y a eu des discussions au plus haut sommet. Je ne parle pas des discussions entre le FCC et CACH, mais entre les Félix Tshisekedi et Joseph Kabila.
Le président Félix Tshisekedi a fait un discours de positionnement au regard des prochaines échéances électorales de 2023, mais pas forcément un discours qui tient compte des préoccupations de la population.