Ce jeudi 4 juillet, Abiy Ahmed, Premier ministre éthiopien, a attaqué, sans la nommer, l’institution chargée du suivi du respect des droits humains en Ethiopie, l’accusant d’être « otage des étrangers ».
« Je voudrais suggérer au Parlement de commencer à enquêter sur le rôle des institutions des droits de l’Homme en Ethiopie », a déclaré M. Abiy lors d’une séance de questions-réponses avec les députés, dans une Assemblée où son Parti de la Prospérité (PP) détient plus de 95% des sièges.
M. Abiy semble faire implicitement référence à la Commission éthiopienne des droits de l’Homme (EHRC), seule institution prévue par la Constitution en la matière. Administrativement indépendante du gouvernement, l’EHRC est selon la loi responsable devant la chambre basse.
Interrogée par l’AFP, l’EHRC n’a pas souhaité faire de commentaire. « Nous payons leurs salaires, mais il semble que ces institutions poursuivent les objectifs d’étrangers », a ajouté le Premier ministre.
« Les institutions des droits de l’Homme sont à l’abri de l’influence du gouvernement mais ils sont otages des étrangers », a-t-il affirmé sans fournir d’autres détails ou étayer ses accusations. Ses propos interviennent à la veille de la publication du rapport annuel de l’EHRC et alors qu’a pris fin le 2 juillet le mandat de cinq ans de l’actuel commissaire de l’EHRC, Daniel Bekele, militant reconnu des droits humains en Ethiopie et ancien prisonnier politique.
Accusé de vouloir renverser le gouvernement d’alors, Daniel Bekele avait passé plus de deux ans en prison après les élections générales de 2005, dont l’opposition avait affirmé qu’elles étaient truquées. Des manifestations antigouvernementales avaient été sévèrement réprimées et des opposants arrêtés.
Lors de sa nomination, M. Bekele avait hérité d’une Commission à la réputation dégradée, vue jusque-là comme soumise au pouvoir. Et son choix par M. Abiy, qui avait proposé son nom au Parlement, avait été perçu comme confirmant la volonté d’ouverture démocratique affichée par le nouveau Premier ministre, nommé un an auparavant.
L’EHRC a depuis émis de nombreuses critiques sur l’action des forces gouvernementales lors des différents conflits en Ethiopie ces dernières années, notamment dans la région septentrionale du Tigré, ou plus récemment contre l’état d’urgence et les nombreuses arrestations dans l’Etat régional de l’Amhara en conflit.
La loi charge la Commission d’éduquer le public aux droits de l’Homme, de s’assurer qu’ils sont protégés et respectés et de prendre des mesures en cas de violations. Selon son rapport 2023, l’EHRC était financée à 45% par une subvention du gouvernement et à 55% par des partenaires extérieurs.
AFP/Sahutiafrica