Parce que quand elle arrive à Kin, ça fait peur. Ça fait peur à tout le monde, parce que pour nous tous ici à Kin, qu’on soit riche ou pauvre, la pluie fait peur. Et comme tout le monde a peur de la pluie, cela signifie que, lorsque la pluie s’annonce, tout le monde est pressé de rentrer chez soi.
Quand tout le monde rentre en même temps, avec les désordres qui nous caractérisent, l’impatience et les cortèges de nos puissants de la République, qui ne respectent presque jamais les codes de la route, eh bien, ça donne : embouteillage monstre ! Conséquences : le fait de rester longtemps sur la route, avec l’eau qui abîme les éléments qui composent la route, plus le poids total des piétons, pousseurs, motards, taxis, taxis-bus, tracteurs, militaires armés jusqu’aux dents pour la sécurité de nos hommes politiques ici à Kin, alors que le besoin en armes lourdes devrait être pour les zones occupées du pays. Bref, ça fait beaucoup de poids, et du coup, les routes se cassent…
La pluie m’énerve…
Alors qu’il y a, selon de nombreuses sources dignes de foi, « au moins 4 milliards de dollars américains », en francs congolais, tout cet argent, même dans nos rêves, on ne va pas finir de le compter. Et donc, alors qu’il y a cet argent pour reconstruire les routes de Kin, il pleut tout le temps… L’argent, quand il reste trop longtemps entre les mains, ce n’est jamais bon. Alors nous conseillons aux autorités deux solutions : la première, elles doivent aller consulter des marabouts. Ces marabouts, qui pour de petits matchs insignifiants, sont capables de retenir la pluie ou de la faire tomber abondamment pour troubler les adversaires. Elles peuvent aussi aller consulter des hommes de Dieu.
À Kin, il n’en manque pas. Si les anciens prophètes ont pu retenir les pluies, le soleil, oui, si les anciens hommes de Dieu ont pu diviser la mer en deux, retenir la pluie à Kin pendant deux ou trois mois serait un jeu d’enfant. Mais n’oublions pas leurs dîmes et leurs offrandes. Sinon, si on va dans la logique de leur escroquer cet argent, nos routes vont se transformer en béton papier. On dit ça parce qu’il y en a dans notre pays qui sont capables d’aller escroquer Satan lui-même. Nous avons dit. Pour la deuxième solution, pardon…
La pluie m’énerve…
Parce qu’il pleut des immeubles presque partout à Kin et surtout de la bière alors qu’officiellement le pays n’a pas d’argent. Pardon : visiblement, nous sommes déjà perdus. Sachons seulement qu’à Kin, la pluie énerve, parce qu’après la pluie, ce n’est jamais le beau temps…
Christian Gombo, Ecrivain