Au Burkina Faso, les autorités ont suspendu les programmes de la BBC et VOA émettant à Ouagadougou une durée de deux semaines depuis jeudi 25 avril.
Le Conseil supérieur de la communication (CSC) justifie sa décision par la diffusion jeudi sur les ondes et les plateformes numériques de BBC-Afrique et de VOA d’un article accusant l’armée burkinabè d’exactions sur des populations civiles. Cette institution indique avoir décelé dans le contenu dudit article « d’énormes déclarations péremptoires et tendancieuses contre l’armée burkinabè sans éléments de preuve tangibles, d’autant plus que le même article invite à une enquête indépendante ».
Cette source affirme aussi avoir « enjoint » aux fournisseurs d’accès à internet de suspendre l’accès aux sites et autres plateformes numériques de la BBC, de la VOA et de l’ONG Human Rights Watch (HRW) à partir du territoire burkinabè.
Elle estime que l’approche de la BBC et VOA porte atteinte aux principes cardinaux du traitement de l’information. Le conseil de communication du pays affirme que « ces médias constituent une désinformation de nature à porter le discrédit sur l’armée burkinabè et veulent créer des troubles à l’ordre public ».
Dans son rapport publié jeudi, HRW a accusé l’armée burkinabè, aux prises avec les groupes armés djihadistes, d’avoir exécuté au moins 223 civils dont au moins 56 enfants lors de deux attaques dans le Nord du pays.
Selon Sadibou Marong, directeur de Reporters sans frontières (RSF) pour l’Afrique subsaharienne, les suspensions de ces médias sont abusives et constituent une violation flagrante du droit à l’information. Il explique que ces médias n’ont fait que publier des informations d’intérêt général pour les populations burkinabè.
Depuis l’arrivée au pouvoir du capitaine Traoré, les relations entre le Burkina Faso et l’ancienne puissance coloniale française se sont considérablement dégradées. Depuis, ce sont les médias français, qui ont jusqu’alors été les plus visés.
La suspension des radios britanniques et américaines suit celles, temporaires ou définitives, prises à la rencontre de plusieurs autres médias étrangers, principalement français- depuis l’arrivée au pouvoir par un coup d’État du capitaine Ibrahim Traoré en septembre 2022.
Si ce pays a déjà suspendu temporairement ou sine die la diffusion de plusieurs chaînes de télévision ou de radio françaises et expulsé des correspondants étrangers, en particulier français, l’autorité de la communication invite l’ensemble des médias à s’abstenir de relayer, à travers leurs différents supports, cet article tendancieux de nature subversive.
Le Burkina Faso a ordonné en fin mars la suspension sine die de la chaîne de télévision France 24. C’était après avoir suspendu en décembre 2022 la Radio France Internationale (RFI), deux médias publics accusés notamment d’avoir relayé des messages de chefs djihadistes.
En avril, il a expulsé les correspondants des quotidiens Libération et Le Monde. En fait, Libération avait publié une enquête sur les exactions supposées de l’armée. L’année dernière, le Burkina a suspendu en septembre la diffusion sur son territoire de Jeune Afrique (journal papier et site internet), un média basé en France, après la parution d’articles évoquant des tensions au sein de l’armée burkinabè. En juin de la même année, c’est la chaîne française LCI qui avait été suspendue pour trois mois.
Josaphat Mayi