Le Kenya en attente des résultats après les élections

Ce mercredi 10 août, les Kényans attendent avec impatience les résultats des élections tenues la veille dans le calme, pour savoir qui du vétéran Raila Odinga ou du vice-président sortant William Ruto sera leur prochain président. 

Ces deux favoris, sur les quatre candidats en lice, ont assuré durant la campagne qu’ils reconnaîtraient les résultats. Mais le pays redoutait mercredi d’être une nouvelle fois happé dans une saga post-électorale dont il est familier, tous les scrutins ayant été contestés depuis 2002 dans ce pays d’Afrique de l’Est considéré comme un point d’ancrage démocratique dans la région. 

A Kisumu (ouest), les magasins sont fermés le long de la principale rue commerçante. Aux coins des rues, les débats vont bon train, la presse du jour est épluchée. « Les résultats (provisoires) sont au coude à coude, donc on ne sait jamais », commente Koga Edward, 65 ans. 

A Eldoret, une ville de la vallée du Rift (ouest) où une discrète présence policière est visible, Hillary Cheplong, 36 ans, un agent de la sécurité sociale, est impatient de connaître les résultats. « Je veux un président que j’ai élu pour qu’il puisse changer le coût de la vie, l’économie et améliorer la vie de beaucoup de gens ». 

A moins qu’un des candidats ne recueille plus de 50% des voix et soit directement élu, les deux candidats qui arriveront en tête s’affronteront lors d’un second tour dans les 30 jours suivants, ce qui serait une première au Kenya. 

La pression s’accroît donc sur la Commission électorale indépendante (IEBC), qui doit déclarer les résultats au plus tard le 16 août. Ses agents travaillent d’arrache-pied pour dépouiller les millions de bulletins pour certains encore précieusement enfermés dans des urnes en plastique, et dissiper les craintes de truquage. 

Après le dépouillement manuel dans le bureau de vote, les résultats sont transmis électroniquement à l’échelon de la circonscription pour être compilés, puis au niveau national pour aboutir au résultat final. 

« Nous nous efforçons de terminer le dépouillement et la vérification des résultats dès que possible », a déclaré mardi soir le président de l’IEBC, Wafula Chebukati, prévenant toutefois que les Kényans devraient s’armer de patience. 

L’IEBC, d’autant plus sous pression qu’elle a déjà été lourdement critiquée en 2017, devra aussi s’expliquer sur les défaillances technologiques et autres incidents survenus depuis lundi et qui ont notamment entraîné l’annulation de six scrutins locaux. 

Aucun changement 

Les Kényans se sont rendus aux urnes pour choisir le successeur d’Uhuru Kenyatta, membre de l’influente communauté kikuyu au pouvoir depuis 2013, mais aussi leurs parlementaires, gouverneurs et élus locaux. 

La journée du vote a été « relativement calme et pacifique », selon la police. 

Malgré les longues queues qui s’étiraient dans la matinée, la participation semblait dans certaines régions à la baisse. Sur les 22,1 millions d’électeurs, un peu plus de la moitié avaient voté à 16H00 (13H00 GMT). 

Deux favoris se sont dégagés dans la course à la présidentielle. 

Le premier, Raila Odinga, 77 ans et membre de l’ethnie luo, était un opposant historique jusqu’à 2018 et son rapprochement avec Kenyatta, un pacte surprenant, mais typique de la très versatile politique kényane. 

Le second, William Ruto, homme d’affaire sulfureux de 55 ans, un Kalenjin qui se présente en opposition aux « dynasties » incarnées par MM. Kenyatta et Odinga, héritiers de deux familles au cœur de la politique kényane depuis l’indépendance en 1963. 

Leurs promesses de campagne, axées sur le pouvoir d’achat et la lutte contre la corruption, n’ont pas nécessairement convaincu des Kényans qui, pour environ un tiers d’entre eux, vivent dans la pauvreté. 

« Je n’ai même pas voté parce que je m’en fiche, parce que ce sont les mêmes vieux qui racontent les mêmes vieilles histoires et ils ne font rien pour nous », a estimé Caroline Mwangi, 31 ans, serveuse dans un restaurant de Nairobi. 

En 2017, la participation frôlait les 80%. Mais la présidentielle d’août 2017 avait été invalidée par la justice pour « irrégularités », puis reprogrammée, écornant la réputation de l’IEBC. 

Depuis, les alliances politiques ont changé. Mais la corruption est restée endémique et les effets de la pandémie, de la guerre en Ukraine et de la sécheresse en cours sont venus accentuer des inégalités déjà criantes et dominer la campagne. Cette flambée du coût de la vie pourrait aussi avoir supplanté le traditionnel vote tribal dans l’isoloir, selon certains analystes. 

Odinga comme Ruto ont notamment promis un avenir économique plus radieux pour les jeunes, les moins de 34 ans représentant les trois quarts de la population mais étant particulièrement touchés par le chômage. 

AFP/Sahutiafrica 

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