Dans une interview exclusive accordée à Sahutiafrica, Serge Bambara, artiste musicien et militant politique burkinabé connu sous le nom de Smokey, confie qu’il attend connaître la vérité sur les circonstances de l’assassinat de Thomas Sankara, père de la révolution burkinabé, à l’issue de ce procès. Pour lui, ce procès doit être pédagogique pour permettre aux Africains de se réconcilier avec leur histoire. Mais aussi aux Burkinabés de retrouver la confiance à la justice de leur pays.
Au Burkina Faso, le procès de l’assassinat de Thomas Sankara s’est ouvert au Tribunal militaire de Ouagadougou, capitale du Burkina Faso. Blaise Compaoré, ex-président en exil en Côte d’Ivoire depuis son éviction en 2014, est l’un des accusés principaux. Il doit répondre des faits de complicité d’atteinte à la sûreté de l’État, d’assassinat et de recel de cadavres. Sur les quatorze accusés, douze autres ont été à la barre lors de l’audience publique ce lundi 11 octobre. Le procès a été renvoyé au 25 octobre prochain, à la demande de deux avocates de la défense, qui ont demandé plus de temps pour consulter les pièces du dossier.
Sahutiafrica : 34 ans après, le procès de l’assassinat de Thomas Sankara s’est ouvert ce lundi. Qu’attendre de ce procès ?
Smockey : Nous attendons la vérité tout simplement. Que le droit soit dit. On ne demande pas plus. Les avocats de certains thuriféraires de l’ancien régime disent que c’est un procès politique. Je pense qu’il s’agit avant tout d’un procès pour assassinat sur treize personnes. Il faut qu’il ait la vérité. Il faut que ce procès soit d’une certaine façon pédagogique pour que ça puisse permettre aux Africains d’une part de se réconcilier avec leur histoire. Et aux Burkinabés de retrouver la confiance en leurs institutions juridiques. Il faut déjà commencer par là. Épurer un passif qui a trop duré pour pouvoir passer à autre chose. C’est ce à quoi nous nous attendons pour enfin tourner cette page sombre de notre histoire. Et de commencer à essayer de faire en sorte de mener le rêve de Sankara d’oser inventer cet avenir. Il a osé penser à l’inventer. Il faut que nous puissions continuer. Mais pour ça, il faudrait que nous rendions à « César ce qui appartient à César ».
SA : Avec l’ouverture de ce procès, y-a-t-il un espoir de connaître la vérité sur les circonstances du meurtre de Sankara ?
Sm : Certainement. C’est déjà une excellente nouvelle que de savoir que ce procès s’ouvre enfin après trente-quatre années d’impunité. C’est une bonne nouvelle d’abord pour des familles de victimes. Mais aussi pour tous ceux, qui se sentent héritiers de l’héritage du camarade capitaine Thomas Sankara. On a espoir évidemment que la justice burkinabé dise le droit. Je ne crois pas que ça soit l’occasion de noircir le tableau. Bien au contraire, il faut se réjouir de l’ouverture d’un tel procès. Si faut-il le rappeler, ce procès est possible grâce aux sacrifices du peuple burkinabé le 30 et 31 octobre 2014 (les manifestations qui ont abouti à l’éviction de Blaise Compaoré, ex-président).
Propos recueillis par Trésor Mutombo