Assassinat de Chérubin Okende, ancien ministre congolais des Transports et porte-voix d’Ensemble, arrestation de proches de Moïse Katumbi, candidat déclaré à la présidentielle, harcèlement et répression des opposants… Entretien exclusif d’Olivier Kamitatu, directeur de cabinet de Moïse Katumbi, à Sahutiafrica.
Ce jeudi 13 juillet, Kinshasa s’est réveillé avec une nouvelle de deuil. Qui est mort ? Chérubin Okende, proche de Moïse Katumbi. Son corps, criblé de balles, a été retrouvé dans sa jeep teintée. Des images sur la toile montrent sa jeep déroutée, une roue sur la bordure, devant le portail d’une carrière de grès. Cet assassinat agite la classe politique, fait réagir et suscite l’indignation. Ensemble pour la République dénonce « un assassinat politique », alors que les autorités ont annoncé avoir ouvert une enquête pluridisciplinaire, en associant les services étrangers.
Mais, à cinq mois de la présidentielle, la pression ne faible pas entre le pouvoir et le camp de Moïse Katumbi, son allié d’hier. Le parti Ensemble ne croit pas à la crédibilité de la justice congolaise et exige une enquête internationale. Il dénonce les arrestations et harcèlement du régime contre les lieutenants et proches de Moïse Katumbi, évoquant notamment les cas de Salomon Idi Kalonda, détenu et inculpé pour atteinte à la sûreté de l’Etat, de Mike Mukebayi, placé sous mandat de dépôt à la prison de Makala et Franck Diongo, lui aussi en détention. Pour Olivier Kamitatu, ils sont victimes de la chasse aux sorcières. Entretien.
Sahutiafrica : Comment réagissez-vous à l’assassinat du porte-parole de votre parti, Chérubin Okende ?
Olivier Kamitatu : Chérubin Okende était la voix de notre parti. Comme porte-parole, il était une des personnalités les plus importantes. Mais au-delà de la fonction politique, Chérubin était un homme juste, une voix pacifique, un père de famille exemplaire et un fervent chrétien. Il avait activement participé à l’organisation de la messe Papale. Donc, c’est un véritable désastre. On a commis l’irréparable. Ça nous touche considérablement. Ensemble pour la République, parti de Moïse Katumbi, paie un lourd tribut à la démocratie. Il y a l’assassinat horrible, mais on n’oublie pas le kidnapping de Mike Mukebayi, actuellement en prison, celui de Salomon Kalonda en prison militaire, Franc Diongo aussi. Dans tout cela, nous voyons que Moïse Katumbi, ses lieutenants et son parti, sont victimes d’une chasse aux sorcières.
SA: Pourquoi le pouvoir actuel s’en prendrait au parti de Moise Katumbi ? Chérubin Okende représentait-il un danger pour le régime ?
OK : Je peux croire que l’opposition fait peur. Particulièrement, Moïse Katumbi fait très peur au régime. Quand on utilise de telle extrémité, ça montre réellement que le régime est désemparé. Quand les évêques font une comparaison avec l’affaire Chebeya et ont mentionné que c’est la main de Caïn qui a abattu Chérubin. C’est terriblement symbolique de la volonté d’une terreur et de la peur que le régime veut imposer sur l’opposition. Il est nul doute que Moïse Katumbi incarne une des grandes voix de l’opposition.
SA: Qu’attendez-vous des enquêtes que les autorités ont annoncées ?
OK : Les autorités, qui il y a deux semaines, elles ont dit que les droits humains les importaient et qu’ils allaient utiliser toutes les voies de la force pour faire justice. Leur justice à eux. C’était dans un discours tonitruant à Mbuji Mayi davant 40.000 personnes. On a ouvert la voie aux faucons. Un animal qui sent la peur, il attaque. Mais, nous, nous n’avons pas peur. Nous nous croyons dans la force du peuple congolais et dans sa mobilisation. Je pense qu’avec les autres forces de la démocratie, nous allons nous voir et discuter pour rendre d’abord hommage à Chérubin Okende. L’heure de la réaction politique viendra et elle sera une réaction populaire à l’image de ce qui s’est passée avec Floribert Chebeya. C’est une énorme indignation. Ceux qui ont assassiné chérubin ont un chewing-gum collé à leur chaussure. Cela leur marquera toute leur vie.
SA : Vous attendez à ce que les auteurs de l’acte soient découverts, jugés et condamné ?
OK : Quand on refuse déjà un audit indépendant d’un fichier électoral, peut-on croire à la parole des gens qui disent qu’ils vont faire une enquête indépendante ? Il faudrait être bien naïf. Nous exigeons une enquête totalement indépendante à laquelle nous souhaitons que la Monusco, les USA et l’Europe se joignent parce qu’ils ont l’expertise. Nous ne croyons pas à une enquête diligentée par un gouvernement qui ne veut même pas d’un fichier indépendant. Nous voulons une véritable enquête. La mémoire doit être honorée. Elle le sera lorsque nous aurons déjà investigué d’une manière indépendante et découvert qui sont les assassins et derrière eux les vrais commanditaires.
Entretien réalisé par Alimasi Kambale et Joe Kashama