En RDC, la mise en accusation de François Beya, conseiller du président congolais en matière de sécurité, se fait toujours attendre faute de preuves. Pourtant, cela fait plus d’un mois depuis son interpellation à l’Agence nationale de renseignements (ANR). Le Monsieur sécurité de Félix Tshisekedi a été arrêté sur fond de soupçons de tentative de putsch.
« Il n’y a pas de mise en accusation un mois après parce que l’ANR (Agence nationale de renseignements) ne dispose d’aucune preuve contre le conseiller spécial François Beya », affirme Victor Tesongo, du collectif Free François Beya. « Les indices le concernant ne laissent planer aucun doute », assure au contraire un responsable sécuritaire congolais, sous couvert d’anonymat.
Trois jours après son arrestation, la présidence congolaise avait affirmé que les enquêteurs de l’ANR possédaient contre M. Beya des « indices sérieux attestant d’agissements contre la sécurité nationale ».
Pour Jean-Claude Katende, de l’Association africaine des droits de l’Homme (Asadho), le doute persiste sur la réalité de ces indices parce que, dit-il, « on ne peut pas détenir quelqu’un pour atteinte à la sécurité nationale ou un coup d’État et ne pas être capable d’arrêter des complices dans un délai raisonnable ».
Le collectif « Free François Beya » a toutefois indiqué que Guy Vanda, secrétaire particulier de M. Beya, est également détenu dans les locaux de l’ANR, ce qu’ont confirmé à l’AFP des sources sécuritaires.
Par ailleurs, la famille du lieutenant-colonel Arsène Matata, commandant de bataillon de la Garde républicaine (GR), l’unité chargée de la protection du président Tshisekedi, a lancé un avis de recherche pour le retrouver après son arrestation le 14 février.
« Le commandant de la GR, le général Christian Tshiwewe, ne nous a donné aucune raison à son arrestation. Il nous a plutôt interdit de poursuivre les recherches pour le retrouver », affirme à l’AFP Consacré Matata, fils aîné de l’officier aux arrêts. « On soupçonne notre papa d’être le complice de François Beya dans une affaire de coup d’État. Ce qui est totalement faux ! Il s’agit d’un montage grossier de ceux qui considèrent son ascension au sein de cette unité comme une menace pour eux », ajoute-t-il.
Plusieurs cadres du Conseil national de sécurité (CNS), que dirigeait François Beya, ont en outre été interrogés par les enquêteurs, selon un responsable sécuritaire. « S’il le faut, les enquêteurs procéderont à des arrestations parmi les civils et les officiers », indique-t-il, sans fournir davantage de précisions.
En attendant, la détention de François Beya pendant 35 jours sans mise en accusation ni procès « est préoccupante parce que ses droits sont violés », insiste M. Katende de l’Asadho.
Pour ce défenseur des droits de l’Homme, « les personnes chargées de cette affaire sont allées vite en besogne, pour des raisons inavouables, peut-être dans le cadre d’une guerre des clans autour du président de la République ».
« Un procès public éclabousserait le régime, qui étalerait ses faiblesses, alors qu’une relaxe pure et simple discréditerait sérieusement le pouvoir, incapable de faire la lumière sur une affaire de sécurité nationale », analyse un diplomate européen à Kinshasa.
« La détention prolongée de François Beya est une patate chaude pour le président Tshisekedi et pour les milieux militaires, sécuritaires et politiques. Pourquoi ? Parce que personne n’est à l’abri tant qu’une voie de sortie honorable pour tout le monde ne sera pas trouvée », conclut M. Katende.
Détenu depuis le 5 février dans les locaux de l’ANR, M. Beya, 67 ans, reçoit la visite de deux membres de sa famille, son épouse et son frère, ainsi que de son médecin. Mais son avocat attend « impatiemment » d’être autorisé à entrer en contact avec lui, affirme un de ses frères.
AFP/Sahutiafrica