Mardi 13 décembre 2022. Réveil comme tous les jours par ici. Mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Non pas parce que le réveil est différent des autres jours, mais simplement parce qu’eux n’ont pas dormi. Le gros orage qui a éclaté en pleine nuit vidait sa colère sur le sol…et sur nous.
Nous qui mangeons des biscuits et en balançons les emballages par-dessus les fenêtres de nos taxi-bus, nous qui en costume-cravate larguons les bouteilles en plastique de nos boissons importées sur la chaussée que nous dévalons à 80 Km/h. Ou encore nous qui au coin de la rue pensons que les sachets dans lesquels nous vendons nos boules de fufu et les emballages de chikwangue vont disparaitre par le fait de l’évaporation.
En tout cas mardi matin, chacun de nous a reçu le retour de bâton dans la figure. Notre insolence envers la terre, envers la nature, nous est revenue de manière concrète. La leçon ? Elle est simple. La question environnementale est une question globale, qui concerne et implique tout le monde.
Mardi 13 décembre 2022, les immondices drainées par l’eau nous ont renseignés sur l’origine des mots : la ville était immonde ! Un mélange de plastique et de déchets divers dévalait fièrement nos rues et les artères de la ville dans un défilé de démonstration de nos irresponsabilités. Nous avons pensé que cacher la saleté réglait le problème de la salubrité. L’expression refaire surface n’aura jamais été aussi bien employée. Parce que la saleté a effectivement refait surface.
Ce mardi, toutes les rivières de la ville ont quitté leurs lits. Une autre façon de se réveiller. Et elles se sont levées tôt. Elles ont pris d’assaut une ville dans laquelle toute la population a été prise en otage. Par où passer, comment passer ? Des centaines de milliers de personnes ont toutes cherché à emprunter au même moment les mêmes artères. Et blocus ! Plus personne ne pouvait passer. Deux heures, trois heures après, personne n’avait atteint sa destination. C’est alors que nous nous sommes rendu compte qu’en fait de ville, Kinshasa est un bocal, et nous des poissons rouges. On tourne en rond. Les routes sont en très mauvais état et le peu qui existe était complètement sous eau. Même les ministres en ont fait les frais. On était tous logés à la même enseigne, les sirènes, policiers et gyrophares en moins pour nous.
Mardi 13 décembre 2022, on s’est posé la question du pourquoi lancer des chantiers multiples de réparation de certains tronçons qui voient pourtant passer des millions de personnes par jour, de manière simultanée. Pourquoi ne pas les aborder les uns après les autres ? En ce jour, on a réfléchi. On a quitté notre pseudo « résilience » apathique pour aller vers notre intelligence, la raison. J’en ai profité pour vite écrire, avant que tout cela ne se dissipe dans Werrason, JB ou encore Inoss. Car dans ce pays, on a la mémoire plus que courte…jusqu’au prochain drame.
Maintenant que cette route d’intérêt vital pour la capitale est coupée, comment vont se comporter les marchés en cette période de fêtes ? Je sais qu’un ministre y fera une descente en compagnie d’un de ses collègues et d’une marmaille de gens, dont on ne sait pas très bien ce qu’ils font là. Mais bon, on y reviendra dans un prochain papier qui parlera des « posturiers ». Retenez bien ce néologisme.
Mais ce genre de descente devrait nous conduire vers des solutions durables, et non des postures politiques et politiciennes. Car, nous paraissons ridicules à recevoir de gros événements comme la Pré-COP 27 sans jamais avoir pris la dimension et les mesures nécessaires pour faire face aux effets de plus en plus évidents du réchauffement climatique. Le climat n’est pas une question à la mode. C’est une réalité.
Je m’en vais vous laisser méditer. Je sais que d’aucuns attendent les prochaines pluies en France et en Italie pour dire qu’eux comme nous, sommes butés aux mêmes problèmes. Je ne trouve pas ici le temps et l’énergie de leur répondre. C’est notre pays. Et pour le rendre beau et grand, il ne faut pas avoir une carte d’adhésion à un parti politique. Ça tient de l’amour, du patriotisme. Il faut sauver Kinshasa des Kinois !
ACC Djate/ Journaliste – Communicologue