Crise de l’électricité : l’Afrique du Sud en état de catastrophe nationale

Jeudi 09 février, Cyril Ramaphosa, président sud-africain, a déclaré l’état de catastrophe nationale pour tenter d’endiguer la profonde crise de l’électricité qui mine le quotidien et l’économie de la première puissance industrielle du continent.

Depuis des mois, 60 millions de Sud-Africains sont obligés de cuisiner, laver leur linge et recharger leur téléphone à certaines heures de la journée seulement. Le pays manque d’électricité et la rationne en imposant des coupures programmées. Ces délestages ont duré jusqu’à près de 12 heures certains jours, la pénurie s’étant aggravée depuis l’année dernière.

« Nous déclarons l’état de catastrophe nationale pour répondre à la crise de l’électricité et ses conséquences, avec effet immédiat », a déclaré M. Ramaphosa, 70 ans, depuis l’Hôtel de Ville du Cap où il a tenu son discours annuel sur l’état de la Nation.

« A circonstances extraordinaires, mesures extraordinaires », a-t-il poursuivi. « Dans l’immédiat, la tâche consiste à réduire significativement et dans les mois à venir l’intensité des délestages pour, à terme, y mettre fin ».

L’état de catastrophe permet principalement de débloquer des fonds exceptionnels. Le parti au pouvoir (ANC, Congrès national africain) avait affirmé la semaine dernière avoir donné « des consignes claires » et sommé le gouvernement d’adopter cette disposition.

Des aides aux entreprises notamment du secteur alimentaire, particulièrement touché par la crise, seront débloquées, a annoncé le chef de l’Etat. Les hôpitaux et les stations d’épuration seront si possible épargnés par les coupures. Un ministre de l’Électricité rattaché à la présidence doit être nommé.

Lire aussi :  Afrique du Sud : le Parlement reçoit le rapport accablant Cyril Ramaphosa

Une menace

L’état de catastrophe vise aussi à apaiser une colère grandissante qui a gagné la rue ces dernières semaines avec des manifestations contre les coupures d’électricité dans plusieurs villes, à l’appel de l’opposition et des syndicats.

Jeudi encore, plusieurs centaines de manifestants étaient rassemblés au Cap, dans un contexte économique et social difficile : le chômage culmine à 32,9%, les prévisions de croissance pour cette année sont quasi nulles (0,3%) et l’augmentation du coût de la vie se poursuit sous l’effet d’une inflation persistante.

« La crise a progressivement évolué pour venir toucher toutes les couches de la société devenant une menace pour notre économie et notre tissu social », a mis en garde M. Ramaphosa.

Cette crise de l’électricité s’ajoute en grande partie aux stigmates de l’ère de corruption sous la présidence de Jacob Zuma (2009-2018). Les caisses de la compagnie publique d’électricité Eskom ont été l’une des principales cibles du pillage organisé des ressources de l’Etat.

Aujourd’hui, l’entreprise qui produit 90% du courant consommé dans le pays est prise à la gorge par une dette de près de 21 milliards d’euros (400 milliards de rands), que le gouvernement tente d’éponger, et se débat avec des centrales au charbon vieillissantes régulièrement en proie aux pannes.

Lire aussi :  L’Afrique du Sud juge inopportune la transition énergétique sans charbon

L’Afrique du Sud, encore largement dépendante des énergies fossiles, peine par ailleurs à se lancer dans une transition vers les énergies propres. Un plan d’investissement de 98 milliards de dollars a été approuvé par les pays riches l’an dernier à la COP27 dans le cadre d’un accord pour une « transition juste ».

Sur le plan politique, Cyril Ramaphosa traverse aussi une période délicate. Jeudi soir au Cap, il a été interrompu à plusieurs reprises au début de son discours, dans une ambiance tendue.

Des membres du parti radical de gauche EFF (Combattants pour la liberté économique) se sont précipités vers la tribune où il se tenait, suspendant la cérémonie; ils ont été exclus de la salle. Les responsables du mouvement avaient juré de ne pas laisser le président « délinquant » s’exprimer.

Embourbé dans une affaire au parfum d’argent sale pour laquelle une enquête de police est en cours, M. Ramaphosa, 70 ans, a échappé à une procédure de destitution en décembre, soutenu par l’ANC. Le parti historique l’a dans la foulée réélu à sa tête, lui assurant un second mandat de chef d’Etat en cas de victoire de l’ANC aux élections générales de 2024.

La Rédaction

Les plus lus

Zambie/Football : Rainford Kalaba a quitté l’hôpital

Plus de peur que de mal pour Rainford Kalaba, ancien international zambien et légende du TP Mazembe, qui a quitté l’hôpital universitaire de Lusaka,...

Le Burkina Faso suspend la diffusion de la BBC et VOA

Au Burkina Faso, les autorités ont suspendu les programmes de la BBC et VOA émettant à Ouagadougou une durée de deux semaines depuis jeudi...

En RDC, le parti de Jean-Marc Kabund exige la libération de leur leader

L’Alliance pour le changement (A.CH) a, lors de la célébration de son deuxième anniversaire d'existence, exigé la libération de l’opposant Jean-Marc Kabund, qui purge...

Somalie : arrestation des commandos entraînés par les États-Unis pour vol de rations

En Somalie, le gouvernement a suspendu et arrêté plusieurs membres d'une unité commando d'élite entraînée par les États-Unis après avoir volé des rations données...

Football/C1-CAF : Al Ahly trop fort pour Mazembe

Battu par Al Ahly d'Égypte au Caire en demi-finale retour vendredi 26 avril (3-0), le TP Mazembe de la RDC est éliminé de la...

Sur le même thème

Somalie : arrestation des commandos entraînés par les États-Unis pour vol de rations

En Somalie, le gouvernement a suspendu et arrêté plusieurs membres d'une unité commando d'élite entraînée par les États-Unis après avoir volé des rations données...

Est de la RDC : l’Onu appelle à davantage d’aide humanitaire pour les déplacés

Ce vendredi 26 avril, les Nations unies ont appelé à une aide humanitaire urgente pour les millions de personnes touchées par l’insécurité dans l’est...

La police britannique arrête trois Soudanais après la mort de migrants en Manche

Ce jeudi 25 avril, la police britannique a arrêté trois Soudanais suite à la mort de cinq migrants, dont un enfant, décédés en tentant...

Nigeria : une centaine de détenus s’évadent de prison grâce aux fortes pluies

Au Nigeria, près de 120 détenus se sont échappés d'une prison après qu'une pluie torrentielle a détruit la clôture de l'établissement, ont annoncé jeudi...

Tunisie : les corps de 14 migrants morts noyés retrouvés à Djerba

En Tunisie, les corps de quatorze migrants morts noyés au large de ce pays, ont été retrouvés sur les côtes de l'île de Djerba...