Tragédie dans l’Etat du Niger, situé dans le centre du Nigeria, le bilan de l’explosion d’un camion-citerne a grimpé à 86 morts le week-end, selon l’Agence de gestion des urgences de l’Etat du Niger.
Ibrahim Audu Husseini, porte-parole de cette organisation, confie que les corps de victimes ont été enterrés dimanche. « Il nous a fallu 14 heures pour enterrer les corps, car nous n’avions pas de pelleteuses et nous avons dû faire appel à des habitants pour creuser manuellement la fosse commune », a-t-il rapporté dans les propos relayés par l’AFP. D’après lui, cinquante-deux personnes souffrent de brûlures sévères.
Samedi matin vers 10H00 (09H00 GMT), un camion-citerne transportant 60.000 litres d’essence a eu un accident au niveau du carrefour de Dikko, dans l’État du Niger, sur la route reliant la capitale fédérale Abuja à la ville de Kaduna. Une foule s’est alors rassemblée près du camion pour récupérer l’essence qui se déversait sur la route lorsque le camion a explosé.
« En rentrant chez nous, nous sommes arrivés au carrefour où l’explosion s’est produite. J’ai vu une femme qui transportait un bidon de carburant et le bidon a explosé et le carburant m’a éclaboussé. C’est ainsi que j’ai été brûlé », a expliqué à l’AFP Dalandi Abdullahi, 29 ans, depuis l’hôpital où il se fait soigner pour de sévères brûlures qui lui ont ravagé le torse et les bras.
« C’est un générateur qui a causé le feu et il n’y avait pas d’eau pour l’éteindre », a raconté Bashiru Umar, commerçant de 28 ans qui a perdu les produits vendus dans ses boutiques lors de l’incendie. « Parmi les brûlés, il y avait aussi des gens qui se contentaient de regarder », a-t-il ajouté.
Forte inflation
La crise économique que traverse le Nigeria depuis un an et demi a poussé dans la précarité de nombreux Nigérians, notamment du fait de l’envolée des prix de l’essence.
Le pays le plus peuplé d’Afrique connaît une inflation supérieure à 30% depuis un an, nourrie notamment par les réformes économiques du président Bola Ahmed Tinubu, au pouvoir depuis mai 2023.
Parmi ces réformes figure la fin des subventions pour les carburants, ce qui a fait s’envoler les prix des denrées alimentaires et des transports, faisant de l’essence un catalyseur du mécontentement des Nigérians.
Certains n’hésitent pas à risquer leurs vies lors d’accidents de la route pour récupérer du carburant, dont le prix a quintuplé en 18 mois. A la fin de l’année dernière, un rapport rédigé par des fonctionnaires nigérians, des agences des Nations unies et de grandes ONG humanitaires prédisait que « plus de 33 millions de Nigérians auront faim » en 2025.
En octobre, plus de 170 personnes avaient péri de la même manière dans l’État de Jigawa, dans le nord du pays le plus peuplé d’Afrique, qui est aussi le premier producteur de pétrole du continent.
Le ministre de l’Information, Mohammed Idris, a déclaré que « plus de 265 personnes ont perdu la vie dans des accidents de ce type » durant les cinq derniers mois, dans un communiqué diffusé dimanche.
«Tragique et évitable»
Le président nigérian a « souligné le caractère tragique et évitable de l’incident », dans un communiqué diffusé dimanche matin. Bola Ahmed Tinubu a également ordonné le lancement d’une campagne nationale qui « sensibilisera le public aux risques graves et aux dangers pour l’environnement que représente le ramassage de carburant dans des camions-citernes tombés à terre ».
« Nous devons sensibiliser le public pour qu’il évite de s’approcher lorsqu’un accident de ce type se produit », a déclaré dimanche à la presse Mustapha Lamorde, un représentant de l’autorité de régulation du secteur pétrolier (NMDPRA), venu visiter les lieux de l’accident.
Samedi, le gouverneur de l’État du Niger, Umaru Bago, avait invité « la population à être toujours responsable et à donner la priorité à sa sécurité ».
Les accidents sur des routes mal entretenues sont fréquents au Nigeria. En septembre dernier, une explosion provoquée par la collision entre un camion-citerne et un camion transportant des passagers et du bétail avait fait au moins 59 morts dans l’État du Niger.
AFP/Sahutiafrica