Au moins 56 civils tués en deux jours de combat au Soudan, pas d’issue en vue

Les affrontements font rage dimanche au Soudan pour le deuxième jour consécutif, et ni l’armée ni la puissance force paramilitaire du général Mohamed Hamdane Daglo ne parviennent à l’emporter malgré des combats qui ont tué une soixantaine de civils, dont trois employés humanitaires de l’ONU.

Les deux parties ont annoncé accepter la demande de l’ONU d’ouvrir des « couloirs humanitaires » durant trois heures dans l’après-midi, sans pour autant que les bruits des explosions et des tirs cessent à Khartoum. Les médecins qui, eux, appellent à laisser passer les blessés depuis samedi matin, n’ont pas fait état d’arrivées massives de blessés jusqu’ici durant cette fenêtre qui s’est refermée à 17H00 GMT.

Les combats à l’arme lourde font toujours rage dimanche à Khartoum et dans ses banlieues entre l’armée régulière dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane et les Forces de soutien rapide (FSR), d’ex-miliciens de la guerre du Darfour devenus supplétifs de l’armée avant d’essayer de la déloger du pouvoir depuis samedi.

Depuis samedi, raids aériens faisant trembler les immeubles, tirs d’artillerie, combats de rue au fusil automatique ou à la mitrailleuse lourde n’ont laissé aucun répit aux habitants de Khartoum privés d’eau et d’électricité. Les combats se concentrent dans la capitale et au Darfour, dans l’Ouest.

Un réseau de médecins pro-démocratie a recensé 56 civils ainsi que des dizaines de combattants tués, et plus de 600 personnes blessées.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) de l’ONU a suspendu son aide au Soudan après la mort de ses trois employés, tués dans des combats au Darfour. Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a réclamé que les responsables soient « traduits en justice au plus tôt ».

A Khartoum, baignée dans une odeur de poudre, combats de rue et blindés en travers des routes empêchent tout déplacement. De nombreux hommes armés en treillis déambulent dans les rues, alors que les civils se terrent chez eux pour une nouvelle nuit qui s’annonce longue et anxiogène.

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Dans le centre-ville où siègent les institutions politiques et militaires, s’élèvent des colonnes d’une épaisse fumée noire.

« C’est très inquiétant, on dirait que ça ne va pas se calmer rapidement », s’alarme Ahmed Seif, qui vit avec sa femme et leurs trois enfants dans l’est de Khartoum.

Il redoute que son immeuble ait été touché par des tirs, mais dit avoir « peur de sortir vérifier », par crainte des balles perdues et des hommes en treillis qui quadrillent les rues.

Des témoins ont également fait état de tirs d’artillerie à Kassala, dans l’Est.

Tensions latentes

Le conflit couvait depuis des semaines, empêchant tout règlement politique dans l’un des pays les plus pauvres du monde. Depuis la révolte populaire qui renversa Omar el-Béchir en 2019, le Soudan tente d’organiser ses premières élections libres après 30 ans de dictature.

Lors du putsch ayant mis fin en octobre 2021 à la transition démocratique, le général Burhane et le général Daglo, dit « Hemedti », avaient fait front commun pour évincer les civils du pouvoir.

Mais leur rivalité a explosé samedi.

La communauté internationale multiplie depuis les appels au cessez-le-feu. La Ligue arabe et l’Union africaine se sont réunies en urgence.

Au Caire, les pays arabes se sont mis d’accord pour condamner les violences et appeler à une solution politique, une option qui n’a jusqu’ici pas mené au retour à la transition démocratique au Soudan, sorti seulement en 2019 de trente années de dictature islamo-militaire.

L’Union africaine a de son côté annoncé qu’elle allait dépêcher sur place le président de sa Commission, Moussa Faki Mahamat, et que ce dernier se rendrait « immédiatement » au Soudan « pour engager les parties vers un cessez-le-feu ». L’aéroport, lui, est fermé ainsi que plusieurs frontières, notamment avec le Tchad.

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Depuis les Emirats Arabes Unis, l’ancien Premier ministre civil Abdallah Hamdok, arrêté par le général Burhane lors du putsch d’octobre 2021, a appelé à « empêcher toute ingérence étrangère » au Soudan, un pays, a-t-il rappelé, déjà plongé dans le marasme politique et économique.

Qui tient quoi ?

Il était impossible dimanche de savoir quelle force contrôlait quoi. Les FSR ont annoncé avoir pris l’aéroport samedi mais l’armée a démenti.

Les FSR ont également dit tenir le palais présidentiel. L’armée a démenti et assure surtout tenir le QG de son état-major, l’un des principaux complexes du pouvoir à Khartoum.

Quant à la télévision, les deux parties assurent aussi l’avoir prise. Aux alentours, des habitants font état de combats continus alors qu’à l’antenne, seuls des chants patriotiques sont diffusés, comme lors du putsch.

Car la guerre ouverte entre les généraux est aussi médiatique : samedi, Hemedti a enchaîné les interviews aux chaînes de télévision du Golfe, dont plusieurs Etats sont ses alliés, multipliant les injures contre le général Burhane, resté invisible jusqu’ici.

Hemedti n’a cessé de réclamer le départ de « Burhane le criminel », alors que l’armée publiait sur Facebook un « avis de recherche contre Hemedti, criminel en fuite ».

Antonio Guterres a appelé les deux hommes pour réclamer « un arrêt immédiat de la violence ». Il a exhorté le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, grand voisin influent, à agir alors que depuis samedi Le Caire s’inquiète d’une vidéo montrant plusieurs de ses soldats apparemment aux mains d’hommes des FSR.

AFP/Sahutiafrica

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