Devenu un réel accessoire de mode, le tatouage touche de plus en plus de monde en RDC. Autrefois, il était considéré comme tabou. Certaines personnes qui se faisaient tatouer devaient cacher leurs dessins sur le corps, au risque d’être indexées comme faisant preuve d’éducation ratée ou inachevée.
Juvénale Makengo, un jeune congolais dans la trentaine, est tatoueur professionnel. « J’aime les tatouages et tout mon corps est tatoué” indique-t-il alors qu’il s’apprête rajouter un autre dessin sur son torse. Celui-ci, c’est juste pour la démonstration. Aiguille à tatouage en main, miroir en face de lui, Juvénale a déjà plus de 200 tatouages sur lui. Il passe en moyenne 2 à 3 heures pour se tatouer seul.
Sur sa poitrine, il y a déjà le dessin d’une Bible ouverte. A côté, une fleur, des noms, des chiffres et des dessins. Beaucoup de ses tatouages sont assez intimistes et c’est avec pudeur qu’il nous donne le sens de quelques uns.
«La femme qui porte un enfant, c’est ma mère et moi. Je me suis fait ce tatouage pour ne pas oublier le manque d’affection parentale dont j’ai souffert pendant mon enfance et ma jeunesse. Il y a aussi cette date sur mon avant-bras, c’est celle de la mort de mon père que j’ai gravé pour ne pas oublier. J’ai peur d’oublier le passé», raconte Juvénale Makengo. Comme s’il se soignait à travers ses dessins et se réconfortait. «En les regardant, ils me fortifient et me donnent le courage de me battre pour ma vie», explique-t-il.
Se tatouer pour faciliter le maquillage
Pour certaines femmes, se faire tatouer le sourcil n’est qu’une question d’esthétique qui facilite la vie surtout celles qui ne savent pas s’arranger le sourcil. «Avoir un tatouage permanent de sourcil par exemple facilite le maquillage. Le tatouage des sourcils accentue la beauté et l’attirance puisque tout le monde n’a pas la chance d’avoir des beaux sourcils» confie Pauline, une jeune femme dans la trentaine qui a opté pour un tatouage permanent.
Marie Fatou, jeune femme sénégalaise, a vu ses yeux enflés après un tel tatouage. «J’ai fait une forte allergie après mon tatouage. Je regrette même de l’avoir fait. Heureusement qu’il n’est pas permanent et je ne suis pas prête à le refaire» déplore-t-elle.
Se tatouer n’est pas sans risque, même si dans la plupart des cas, cela se passe sans incident majeur. Le docteur Héritier Kiyunga renseigne que sur le plan médical, cette pratique peut provoquer des problèmes cutanés qui pouvant conduire à différentes maladies, entre autre le cancer de peau ou le cancer de sang, Le tatouage peut également causer des infections et comporter des risques d’allergie et de contamination des virus transmissibles par le sang (VIH, hépatites…). Certains organismes réagissent mieux que d’autres à cette pratique, les risques sont à prendre en considération lorsqu’on veut se faire tatouer.
Juvénale Makengo, le jeune congolais professionnel des tatouages, explique qu’après avoir injecté l’encre sous la peau pendant le tatouage, on applique une crème ou une lotion antiseptique. La surface tatouée est recouverte d’un pansement sec et stérile pour éviter les infections. Il promet de rajouter un autre dessin, une fois qu’il aura une nouvelle inspiration.
La pratique de tatouage remonte aux scarifications qui ont marqué le peuple africain et les Congolais en particulier. Significatif ou pas, certains l’adore. Un dessin, un mot, un nom gravés sur une partie du corps, le tatouage devient un style qui revêt aujourd’hui un aspect plus esthétique et symbolique.
Patricia Mahuge