A la fois auteur, conteur, comédien, humoriste, acteur, hâbleur, menteur, farceur… Saïdou Abatcha, griot africain, combine tous ces moyens pour exprimer son art. Il s’est confié à Sahutiafrica.
Artiste Franco-camerounais, Saïdou Abatcha est un magicien du langage. Natif du nord du Cameroun, ce conteur-humoriste a fait du proverbe africain matière à rire et à penser. Amoureux de bons mots, Saïdou Abatcha séduit et initie son public, à travers ses contes issus de la tradition orale africaine. Depuis Brazzaville, capitale congolaise, où il a séjourné et presté au festival TuSeo, le conteur Saïdou Abatcha a accepté de répondre aux questions de Sahutiafrica. Ce jour-là, il ne s’est pas habillé de son costume richement coloré ou de sa traditionnelle tenue des Nations unies. « La force de Saïdou Abatcha, c’est la force du public », souffle l’artiste franco-camerounais, tout souriant. Entretien.
Sahutiafrica : êtes-vous satisfait de l’ensemble de votre carrière ?
Saïdou Abatcha : On n’est totalement jamais satisfait de ses résultats, car il y a encore à travailler. La perfection, on ne l’a jamais atteint. Pour le moment, je dirai que je fleurai une de cent marches qui conduit vers ce qu’on peut appeler comédien. Bien qu’il m’en reste 99 à franchir pour être comédien au bon sens du terme. J’espère atteindre la moitié de cette marche avec le temps que le bon Dieu va m’accorder sur la terre des hommes.
S.A : qu’est-ce qui fait la force de Saïdou Abatcha ?
S.AB : La force de Saïdou Abatcha, c’est la force du public. Je m’inspire de l’actualité, des choses qu’on vit quotidiennement. Et puis, je ne vais pas aller chercher là où ça n’existe pas. C’est des choses que nous vivons, que nous partageons et avec lesquelles nous construisons.
S.A : D’où vous est venu, cet amour pour les proverbes ?
S.A : Dans ma langue maternelle (peul), il y a beaucoup des jeux de mots. Je cherche toujours à savoir ce qui est caché derrière les mots et cela me permet encore d’avoir envie de lire, de découvrir et à écrire.
S.A : Et cette envie de partager votre expérience avec les autres générations. Comment l’expliquez-vous ?
S.A : J’apprends également malgré ma carrière, car il y a des choses que je ne maîtrise pas, alors que la génération actuelle en a la maîtrise. Pour moi, la fierté, c’est de partager le peu que j’ai appris parce que dans la tradition africaine, la culture du partage passe par trois étapes à savoir : l’apprentissage, l’expérience et la transmission. On n’a jamais cessé d’apprendre tout comme on n’aura jamais fini de transmettre. Le savoir, c’est l’une de plus grandes fortunes du monde. Comme le disait mon maître à penser Amadou Ampathé Ba : en Afrique, quand un vieillard meurt, c’est toute une bibliothèque qui brûle.
S.A : que conseillez-vous aux jeunes pour l’avenir du continent ?
S.A : L’Afrique est un continent de paix, mais également le berceau de l’humanité. Elle est aussi le berceau de l’humilité. La plus puissante bombe atomique que connaît le monde actuellement, c’est l’Afrique qui la détient avec sa jeunesse. Cette bombe si on ne s’en occupe pas, qu’on ne lui donne pas les moyens d’aller à l’école, de travailler, de gagner convenablement leur vie. Ce n’est pas seulement l’Afrique qui sera détruite, mais c’est plutôt le monde entier qui en subira les conséquences. Si je ne suis pas en paix, tu ne le seras non plus.
Propos recueillis par Ali Maliki