Le week-end dernier, la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) a publié le calendrier du scrutin électoral en RDC prévu en décembre de l’année prochaine. Si certains font part de leur pessimisme au regard du retard pris par l’organe électoral. Trésor Kibangula, analyste au Groupe d’étude sur le Congo, estime qu’il faudrait accorder le bénéfice du doute à la Ceni, même si le calendrier s’annonce serré. Il s’est confié à Sahutiafrica.
Sans se montrer pessimiste, il n’exclut pas le risque qui plane sur un probable dépassement du délai par la Ceni. « On a eu l’expérience avec la feuille de route qui n’était pas un document contraignant, mais un simple document de travail. Beaucoup d’échéances reprises dans ce document n’ont pas été respectées », évoque-t-il.
La Ceni a annoncé le début des opérations d’enrôlement de décembre 2022 à mars 2023. Un véritable pari pour M. Kibangula, qui attend à voir comment la Ceni va procéder pour respecter ce chronogramme.
« Avec la cartographie électorale par exemple, on a vu la Ceni terminer le travail plusieurs mois après la date qui était indiquée pour la fin. Ce sont des signaux négatifs, car ce sont des choses qui sont censées mettre en confiance toutes les parties prenantes au processus. Mais avec ces délais très serrés et le chevauchement de certaines opérations électorales, il y a quand même de quoi être inquiet par rapport au respect du calendrier publié par la Ceni », renchérit-il.
Il pense qu’il est possible que la Ceni gagne son pari, si elle adapte son niveau de travail à ses ambitions comme dans d’autres pays. « Mais aujourd’hui, je crois qu’il faut quand même donner un bénéfice du doute à la Ceni. Elle a promis d’innover et de recourir à de nouveaux outils. Ailleurs, dans d’autres pays, on voit quand même les opérations liées aux élections s’effectuer dans des délais très courts », déclare-t-il.
Chaque pays a ses défis. Et la RDC n’en a pas de moindres. « Il y a la fois l’absence de l’état-civil, qui peut être contournée parce que ce n’est pas la première fois qu’on organise les élections. Donc on a quand même un fichier électoral qui existe, mais qui va nécessiter certainement une révision. La crainte, c’est peut-être par rapport au temps qu’on laisse à l’audit de ce fichier. Mais il faut rester positif et continuer à surveiller le déroulement du processus électoral », suggère-t-il.
L’autre défi est la transparence. A cette question, le chercheur préconise « qu’il faut s’assurer que toutes les parties prenantes aient le même niveau d’information. « Parce que jusqu’à ce jour, c’est la Ceni seule qui mène toutes les opérations sans communiquer les résultats de celles-ci ». Ce qui est un vrai problème », allègue-t-il.
La question sécuritaire reste le plus grand des défis par rapport à la tenue des élections en RDC.
Mais Trésor Kibangula rappelle un précédent bien que fâcheux de 2018, où quelques parties du pays en proie à l’insécurité avaient été exclus du processus électoral. « Cela serait incohérent si la Ceni ou le gouvernement utilisait la situation sécuritaire dans certains coins du pays comme raison de report ou de non-organisation des élections dans le reste du pays », souffle-t-il.
La Ceni prévoit également d’enrôler et de faire voter des Congolais de l’étranger avec comme pays pilotes : les USA, la France, l’Afrique du Sud, le Canada et la Belgique. Une initiative que loue l’analyste, qui pense que « tous les Congolais, même ceux qui vivent à l’étranger ont le droit d’élire leurs dirigeants. C’est un pas dans la bonne direction ».
Mais se questionne sur la capacité de la Ceni à gérer les flux des personnes qui vont arriver dans les pays choisis. « A savoir qu’on ne maîtrise pas le nombre de Congolais qui vivent à l’étranger. Là encore ça va être un autre casse-tête », conclut-il.
Dinho Kazadi