1. Que retenir de la vie politique congolaise 60 ans après les indépendances?
Nous avons posé la question au professeur Mwayila Tshiyembe. Voici ses réponses.
Pas grand-chose à vrai dire si l’on prend comme paramètre le niveau de vie des Congolais. En effet l’un des objets de l’Etat indépendant, c’était de rendre meilleure la vie des Congolais par la paix, le travail et la justice pour ne s’en tenir qu’à la devise nationale
Soixante après, c’est le désenchantement de l’indépendance. Si les pères de l’indépendance étaient de passage sur la terre des hommes, Patrice LUMUMBA et Joseph Kasa-Vubu ne reconnaîtraient pas leur bébé, eu égard à la misère de la population et de l’Etat (budget famélique ne dépassant pas dix milliards de dollars)
2. La RDC est-elle réellement un état indépendant?
Comme d’autres Etats du tiers-monde, la RDC est un Etat indépendant au sens juridique du terme, c’est-à-dire selon trois critères à savoir la plénitude de la compétence (c’est la RD Congo qui définit l’étendue de ses pouvoirs sans demander l’autorisation d’un Etat étranger), l’autonomie de la compétence ( la RDC exerce la pleine liberté d’agir, selon sa volonté propre, au sens du principe de l’égalité souveraineté des Etats), l »exclusivité de la compétence (la RDC exerce l’exclusivité de la compétence à travers les quatre institutions : le président de la République, le gouvernement, le parlement, les cours et tribunaux)
Néanmoins, il y a lieu de dire que la RDC n’est pas réellement indépendante si cette dernière signifie la capacité de faire, de faire faire et d’interdire de faire que l’on appelle savamment la puissance. Il existe des Etats qui possèdent cette capacité, et il y en a qui n’en possèdent pas
Car la capacité de faire, de faire faire, d’interdire de faire, est une œuvre de création, de stratégie nationale, définissant les fins et les moyens.
Autrement dit, c’est l’oeuvre collective du leadership individuel et du leadership sociétal.
Or, si le leadership individuel à été identifié dans les aspirations de LUMUMBA, Kasa-Vubu, Mobutu, Kabila, Tshisekedi, pour ne citer qu’eux, le leadership sociétal est inconnu depuis l’indépendance faute d’institutions fortes d’une culture politique pérenne fondée sur la responsabilité.
3. En 1960, les partis politiques étaient à base tribale et aujourd’hui que se passe-t-il ? A-t-on évolué ?
Il est vrai que du point de vue juridique, la base tribale n’est plus un référentiel pour valider un parti politique.
Néanmoins, la sociologie des partis politique révèle que le tribalisme comme nationalisme des peuples precoloniaux, c’est-à-dire avant la création de l’Etat indépendant du Congo (1885 par 14 puissances internationales), est le socle premier des partis politiques congolais.
Il suffit d’observer la vie politique congolaise pour constater qu’un parti politique créé par tel ou tel leader est identifié à lui et à son ethnie par l’opinion publique(avantages matériels et moraux), par-delà le paramètre électoral consacrant la tribu comme fief, élargi au territoire (chefferie, secteur, ville commune).