« C’est d’abord une question d’éducation de la population et de la formation des forces de l’ordre. Il faut qu’on apprenne à tout le monde que la Constitution dit que les manifestations sont libres et pacifiques. Or ici, lorsqu’on vient manifester, on vient pour en quelque sorte caser l’adversaire, qui peut être le pouvoir en place. Pour le pouvoir en place caser l’adversaire, qui est l’opposition. C’est une question de culture démocratique. Nous manquons de culture démocratique. On pense que pour se faire entendre, il faut crier ou être violent », a expliqué le professeur Placide Mabaka Mukwabuhika, analyste politique congolais, à Sahutiafrica.
En RDC, les manifestations politiques sont marquées par des actes de violence. Des jets de projectiles, des tirs de gaz lacrymogène et à balles réelles. Samedi 16 octobre, Lamuka, plateforme de l’opposition, a manifesté pour exiger la dépolitisation de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Il est 13 heures passées de quelques minutes alors que le climat est doux à Kinshasa, capitale congolaise. A Limete, commune située dans le centre de Kinshasa, la tension est vive. Une forte présence policière. Des rues sont désertes. Des jets de pierres ont éclaté entre les manifestants et plusieurs groupes de jeunes. Les agents de la police tentent de disperser les manifestants à coups de gaz lacrymogène.
Le petit boulevard est barricadé par plusieurs groupes jeunes avec des armes blanches en mains. La circulation est bloquée. Un bus de transport en commun appelé « Esprit de vie » saccagé. Certains motards et leurs clients sont pris à partie. Dans la panique, les clients se cachent dans des parcelles le long du petit boulevard. Mais d’autres motards font demi-tour. Après des accrochages devant le siège de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), parti au pouvoir, il y a un moment de calme. Le grand boulevard est rempli de pierres. Des véhicules et des motos roulent sur les pierres. Pourquoi des manifestations politiques ne sont-elles pas pacifiques ?
Pour l’analyste, « les partis politiques doivent encadrer et d’éduquer leurs militants ». Le professeur Placide Mabaka affirme qu’il y a aussi une question de formation des agents de l’ordre ». « Je ne dirai pas que la violence est dans la culture politique congolaise. Mais il y a un problème dans la culture de l’opposition. On n’est pas encore mûr dans l’opposition. Très souvent, c’est une opposition de confrontation et non pas de construction. C’est pour ça, j’ai parlé de radicalité. L’UDPS était très radicale dans l’opposition. Fayulu est dans le même chemin. Du coup face au pouvoir en place et aux forces de l’ordre, il y a une forme entre guillemets de guerre », a-t-il dit.
« Le pouvoir en place doit faire l’effort de bien former les forces de l’ordre pour qu’ils soient plutôt comme des agents de préservation de libertés publiques et non pas en quelque sorte des travailleurs pour le compte du pouvoir en place. Les forces de l’ordre doivent être neutres pour préserver les biens publics et la sécurité publique », a préconisé le professeur Placide Mabaka.
Trésor Mutombo