Entre Constant Mutamba, ministre congolais de la Justice, et les magistrats, la hache de la guerre ne semble pas être enterrée.
Mardi 15 octobre. Rentrée judiciaire de la Cour de cassation. Salle de congrès du Palais du peuple. Le ton est fort dans le discours de Leon Ndomba, 1er président de la Cour de cassation. Devant le président Tshisekedi. Et surtout, Constant Mutamba. Il n’épargne pas le ministre de la Justice, dénonçant « le discours populiste qui vilipende les magistrats tout au long des journées ». Pour Leon Ndomba, les magistrats ont aussi besoin d’être « couverts par la présomption d’innocence ».
Toutefois, il nuance ses propos. « Même s’il est évident qu’il y a certainement des antivaleurs », a-t-il reconnu. « Les membres de nos familles. Surtout, nos enfants. Ceux dont les parents sont honnêtes et justes. Ils traînent la honte d’être pointés du doigt comme de l’œuvre descendants des antivaleurs, alors que nous luttons, avec eux, pour accompagner votre haute autorité contre cette peste de corruption », a glissé le 1er président de la Cour de cassation.
La réaction de Constant Mutamba n’a pas tardé. Depuis, son discours enregistré fait le tour des réseaux sociaux. Issu des rangs de l’opposition, le Garde du sceau s’est mis à dos une partie de l’appareil judiciaire, qu’il dit vouloir nettoyer et réformer. « Tout ceux qui crient au populisme ne précisent pas quelle loi le ministre a violée, parce que nous faisons tout conformément à la loi. C’est plutôt à eux de respecter la loi », a répliqué M. Mutamba, au lendemain de la rentrée judiciaire de la Cour de cassation.
Le ministre de la Justice promet de ne pas « reculer tant que le président Tshisekedi ne lui donnera pas des instructions contraires ». « Lorsque tous ces réseaux mafieux se réunissent, ils auraient dû avoir honte d’eux. Ils ont à faire à un jeune, qui pouvait aimer autant la vie et devait verser dans les antivaleurs qu’eux. Mais, lorsque c’est un jeune, qui doit commencer à leur administrer les leçons d’éthique, il y a un problème », a glissé Constant Mutamba.
Une nouvelle passe d’armes entre le ministre et les magistrats. Entre les deux piliers de l’appareil judiciaire, les relations ne ressemblent pas à un long fleuve tranquille. Visiblement, la hache de la guerre peine à être enterrée. Déjà en août dernier, les tensons avaient atteint leur pic. Ce qui avait poussé le Syndicat autonome des magistrats du Congo (Synamac) à déplorer ce qu’il considère comme « une tendance du ministre de la Justice à faire porter aux magistrats la responsabilité exclusive des dysfonctionnements de l’administration de la justice ». Mais Constant Mutamba s’est défendu, arguant de ne pas être passif face à ces critiques.
Après la tentative d’évasion à la prison de Makala qui a donné lieu à des tueries (Bilan officiel : 131 morts), le Garde sceau a rejeté l’hypothèse d’une tentative d’évasion, parlant d’un « sabotage ». Il a aussi pointé les magistrats, qui continuent d’envoyer les prévenus dans cette maison carcérale, malgré ses efforts pour la désengorger. Sa décision, d’interdire le transfert à la prison de Makala sans son autorisation, a été boudée par le Conseil supérieur de la magistrature.
Trésor Mutombo