Un retour de Karim Wade et Khalifa Sall dans la course pour la présidentielle va-t-il changer la configuration politique au Sénégal ? Oui, répond Alassane Samba Diop, analyste politique sénégalais.
« On sait qu’en 2019, le Parti démocrate sénégalais (Pds) n’avait pas de candidat. Karim Wade non plus était candidat. Ce qui a permis à Macky Sall de gagner les élections dès le premier tour avec Idriss Seck deuxième. Sonko troisième. C’est clair que les voix de ces deux partis, qui n’étaient pas aux dernières élections, auraient été réparties entre les autres. Cela veut dire, si Khalifa Sall et Karim Wade sont candidats, cela va changer la configuration politique de 2019 parce que leurs partis vont aller chercher les voix », analyse Alassane Samba Diop.
Retour de Karim Wade et Khalifa Sall
Le samedi, le Parlement a adopté un vote qui permet à toute personne condamnée puis graciée ou amnistiée à candidater aux élections. Ce qui ouvre la voie à Khalifa Sall et Karim Wadi, exclus lors de la présidentielle de 2024. C’était l’une des recommandations du dialogue politique, organisé par le président Macky Sall en juin dernier. En fait, la commission politique avait proposé une modification de la loi électorale pour permettre aux candidats inéligibles de se présenter.
Pourtant, Karim Wade, fils de l’ex-président Abdoulaye Wade, avait été condamné à six ans ferme en 2015 pour enrichissement illicite. Khalifa Sall, lui, était aussi inéligible pour ses ennuis judiciaires.
Pour l’analyste Alassane Samba Diop, un probable retour de ces deux figures de la politique sénégalais dans la course peut tourner à l’avantage de ceux qui étaient là depuis longtemps, tout comme à leur désavantage.
« S’ils vont prendre des voix d’autres partis, ça peut aussi être la réalité politique qu’on verra au Sénégal sur l’échiquier en 2024 », commente-t-il. Même si Alassane Samba Diop nuance. Il indique « qu’il y a une grande différence entre déclarer sa candidature et être candidat parce qu’il faut passer des étapes ».
Sonko toujours éligible
« Il faut faire très attention par rapport à la candidature de Karim Wade et celle de Khalifa Sall. Est-ce qu’ils vont passer l’étape de contrôle de dossier au Conseil constitutionnel qui va vérifier le quitus fiscal pour voir s’ils doivent de l’argent à l’Etat sénégalais ? », s’interroge l’analyste.
Entre-temps, Ousmane Sonko, devenu figure la plus voyante de l’opposition, a maille avec la justice. Il est mis en cause dans une affaire de mœurs. Mais l’opposant dénonce un complot pour l’éliminer politiquement.
Après plusieurs épisodes de contestation populaire meurtrière et deux condamnations successives pour diffamation et corruption de la jeunesse, M. Sonko a été écroué fin juillet sous différents chefs d’inculpation, dont appel à l’insurrection, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et atteinte à la sûreté de l’État.
«La politique est dynamique»
Depuis sa prison, M. Sonko a écrit à la justice la semaine passée pour signifier qu’il n’acceptait pas sa condamnation, condition nécessaire selon ses avocats pour que le jugement soit annulé et qu’un nouveau procès ait lieu, a rapporté l’un de ses conseils, Ciré Clédor Ly.
D’après Alassane Samba Diop, Ousmane Sonko n’a pas encore perdu son éligibilité. « La politique est dynamique. La vérité de 11h15 ne peut pas être la même que celle de 11h16’. Les choses bougent beaucoup en politique. Personne ne peut dire la configuration de ce qui se passera dans six mois. On le saura au fur et à mesure que les jours passent », affirme Alassane Samba Diop.
Si le retour de Karim Wade et Khalifa Sall décrispe le climat politique, la condamnation définitive d’Ousmane Sonko pourrait mettre la poudre au feu.
Trésor Mutombo